Malgré la multiplication des démentis officiels, l’idée d’une restructuration de la dette grecque fait son chemin. Selon Reuters, plusieurs sources gouvernementales allemandes estiment que la Grèce ne pourra pas tenir jusqu’à l’été sans restructurer sa dette.
Avec un taux de chômage qui dépasse le seuil des 15%, une inflation à 5%, deux années de récession, dont une chute de 7% de l’activité économique en 2010, et une troisième année consécutive de récession qui s’annonce (le FMI prévoyant une contraction de 3% du PIB pour 2011), Athènes est en mauvaise posture. Son taux à 10 ans déjà très élevé, a bondit à 14% contre 13.3% vendredi dernier. Signe de défiance des marchés, le CDS à 5 ans grimpe encore de 60 points pour inscrire un nouveau record à 1220 points. Plus sinistre encore, le taux à 2 ans flirte avec les...20%
Pourtant, la Grèce a fait preuve de bonne volonté, réduisant de 5 points son déficit public en 2010 pour le ramener à 10.4%, mais ce n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs du plan d’aide, fixé à 8% pour le déficit. De plus, sa dette publique dépassera 150% dès cette année et 160% en 2013 au rythme actuel. Pour rembourser ses intérêts, elle devrait dégager un excédent budgétaire avant remboursement de la dette de plus de 10% de son PIB, un objectif irréalisable selon Jean-Marc Vittori, éditorialiste aux Echos.
Pourtant ce n’est pas faute d’essayer. Le premier ministre M. Papandréou a dévoilé les grandes lignes de son plan d’austérité qui vise à "réduire les dépenses de l'Etat à environ 44 % du PIB, dans la moyenne de la zone euro, contre 53 % du PIB en 2009, et "d'augmenter les rentrées à environ 43 % du PIB, contre 38 % en 2009", a indiqué Censé compléter le tour de vis budgétaire pour relancer l'économie, le gouvernement a annoncé un plan de privatisation d'un montant total de 50 milliards d'ici à 2015. L’Etat va réduire sa part dans le capital de l'opérateur d'électricité DEI pour la faire passer de 51 % à 34%, et va également privatiser partiellement Trainose, la société d'exploitation des chemins de fer ainsi que la compagnie de Gaz Depa. En 2012, l'Etat entend aussi vendre des parts de la caisse des dépôts. Les casinos, usines d'armement, ports et aéroports figurent aussi dans le catalogue des ventes d'ici 2013. Au delà de ce vaste programme de privatisation, rien n‘est dit sur la lutte contre l’évasion fiscale qui représenterait plus de 30% du PIB ainsi que sur les arriérés d’impôts des dix dernières années qui s’élèveraient à 35 milliards d’euros.
Car ce nouveau plan n’apaise pas les inquiétudes des marchés. D’autant plus que la restructuration de la dette présente un enjeu systémique parce qu’elle se répercute directement sur le système bancaire européen alors que personne ne sait précisément à quel point les banques sont exposées à la dette grecque.
Une chose est sûre, les déboires de la Grèce font tache d’huile sur la zone euro. Tous les taux des pays considérés comme à risque par les marchés se tendent. Le Portugal voit son CDS toucher le seuil des 625 (+25pdb), L’Irlande voit le sien grimper à 595 (+30 pdb). L'Espagne pâtit également de l'inquiétude sur les marchés autour des maillons faibles de la zone euro. Le Trésor espagnol a émis aujourd'hui pour 4,658 milliards d'euros de bons à coutre échéance (12 et 18 mois) à des taux d'intérêt en très forte hausse par rapport à la dernière émission similaire. Dans ce contexte, le taux à 10 espagnol grimpe à 5.55% ; contre 5.45% vendredi dernier. Parallèlement, le CDS à 5 ans atteint 247 points (+15 pdb)
Victime collatérale de la défiance de la dette, l’euro plonge face à toutes les devises. Au plus bas depuis le 7 avril, à 1.4259 face au dollar, la monnaie unique plonge de 1.9% face au yen, de 0.8% face au sterling, et de 0.7% face au franc suisse.