Mardi 22 février

L’insurrection populaire qui gronde en Libye et les tensions géopolitiques qu’elles suscitent au Moyen-Orient ont propulsé les cours de pétrole au plus haut depuis septembre 2008. Le brent de la mer du Nord a atteignait un pic à Londres dans la matinée à 108.57$ tandis que le WTI s’échangeait à 98.23$. Pourquoi une envolée aussi fulgurante que spectaculaire ?

D’abord, parce que l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient représentent 35% de la production mondiale de pétrole. Et à lui seul, le Golfe détient 56% des réserves mondiales. La Lybie, membre de l’OPEP, est le quatrième producteur de pétrole en Afrique, avec une production de plus de 1.5 million de barils par jour. Elle exporte 133 000 barils par jour vers la France, et 400 000 barils /jour vers l’Italie, son principal partenaire commercial, qui lui fournit 20% des besoins énergétiques.

Dans ce contexte tendu et instable, certaines majors ont d’ores- et-déjà pris des mesures pour évacuer leur personnel. C’est le cas de BP, de Royal Dutch Shell, du norvégien Statoil qui évacuent leurs salariés sur place. ENI, la compagnie pétrolière italienne (qui a chuté de 5% hier à Milan) et qui produit environ 240 000 par jour sur place (à titre de comparaison Total n’en produit que 50 000) a du se résoudre à réduire la production.

Mais au delà de la crise lybienne, ce que craignent par-dessus tous les investisseurs, c’est la propagation de l’onde de choc à tous les pays du golfe, à commencer par la petite ile de Bahreïn. D’abord parce que si ce domino venait à basculer, la stabilité du détroit d’Ormuz, dont l’importance stratégique est décisive, pourrait être mise ne péril. Ce détroit constitue, en effet, une voie par lequel transite chaque jour, 40 % du commerce mondial de pétrole ; l’équivalent de dix-sept millions de barils selon l’AIE. Un détroit qui donne par ailleurs accès à des pays producteurs d'hydrocarbures aussi importants que l'Arabie saoudite, le Koweït, le Qatar, les Émirats arabes unis, Bahreïn et l'Irak. Ensuite parce que le Bahrein, à majorité chiite, se situe à seulement 15 km de l’Arabie saoudite.

Si l’insurrection venait à contaminer l’Arabie saoudite, le risque sur l’approvisionnement en pétrole changerait de dimension. Car l’Arabie Saoudite, premier exportateur mondial de brut, est assis sur 20% des réserves mondiales. L’Arabie saoudite, c’est la clé du prix du brut. C’est le seul Etat dont les capacités d’extraction seraient suffisantes pour pallier une éventuelle pénurie mondiale.

Or, non seulement ces deux voisins, le Bahreïn et le Yémen, sont en proie à une contestation populaire sans précédent, mais les 27 millions de Saoudiens n’ont plus de monarque à la tête du royaume depuis près de 3 mois. Or, la succession du roi Abdallah, âgé de 87 ans et dont la santé est chancelante, s’annonce délicate.

Postulons un instant que les membres des pays du Golfe basculent l’un après l’autre comme des dominos. Quelles seraient les répercutions sur les cours du pétrole et sur l’approvisionnement mondial? Fondamentalement aucun ; pour la simple et bonne raison qu’une diminution de la production n’est pas tenable économiquement. Un changement de régime, quel qu’il soit, n’est pas à craindre pour l’extraction et la production de pétrole car il aura absolument besoin des compagnies pétrolières. Les pays producteurs dépendent trop étroitement de cette manne financière pour se permettre de diminuer la production. C’est ce qui s’est produit au Tchad ou en Angola, déchirés par une guerre civile meurtrière, durant 15 ans, période durant laquelle les extractions pétrolières n’ont pas cessé.

Il n’en reste pas moins que ces mouvements pour le moins inattendus ont servi de prétexte à des prises de bénéfices sur les marchés actions mondiaux. Parallèlement, le marché réagit avant tout aux tensions géopolitiques au Moyen-Orient et non en fonction des fondamentaux, dont le socle repose sur l'offre et de la demande. Or le marché actuel est suffisamment approvisionné, il n’y a pas de risque de pénurie à court terme.

A long terme en revanche, les conséquences d’une hausse du brut pourraient être dramatiques. Le pétrole cher aurait un impact direct qui nuirait à la reprise économique mondiale, encore fragile, en particulier en Europe et aux Etats-Unis. Plus encore, la flambée du brut alimenterait le grand mal qui nous guette, l’inflation. Car une hausse du brut, dont notre économie dépend intrinsèquement, augmenterait mécaniquement le prix des denrées alimentaires, le prix de l’essence à la pompe, sans parler de tous les produits pétroliers transformés qui rythment notre quotidien. Un baril qui resterait durablement cher ne manquerait pas d’amputer le pouvoir d’achat des consommateurs, la dernière chose dont l’économie mondiale a besoin.

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